lundi 31 mars 2014

Municipales : vague bleue ou effet balancier ?

La défaite de la gauche est historique, elle perd 151 villes de plus de 10.000 habitants, c’est pire qu’en 1983 ! Mais posons la question : cette élection municipale n’est-elle finalement que le miroir inversé de la présidentielle, le rejet de Sarkozy amène Hollande au pouvoir, deux ans plus tard le rejet de ce dernier provoque une déferlante UMP sur le pays ? Cet effet balancier est habituel, on se pose souvent la question d’un vote d’adhésion pour le FN, il faudrait aussi se la poser au sujet du PS et de l’UMP ! Cette élection est d’abord locale bien sûr, mais l’UMP n’a rien proposé au niveau national, pas de programme, pas de mot d’ordre, ne serait-ce qu’un engagement à baisser les impôts locaux (Marine Le Pen, elle, s’y est engagée !).

Sur les sujets locaux, cette élection livre un enseignement qu’il ne faudra pas oublier : lorsque l’UMP part à la conquête d’une ville avec des candidats de la "fausse droite", c’est l’échec assuré, même dans un contexte d’effondrement de la gauche, on l’a vu à Metz (où Marie-Jo Zimmermann s’en va voilée dans une mosquée pour draguer les voix des musulmans, on peut la voir dans cette pitoyable vidéo), à Strasbourg (Fabienne Keller, sénatrice, a voté en faveur de la loi Taubira sur le mariage pour tous), et bien sûr à Paris avec Nathalie Kosciusko-Morizet (lire cet article du Delanopolis). Malheureusement, la plupart des dirigeants de l’UMP sont sur cette ligne… Et ils seront faussement rassurés par l’échec des deux listes d’union droite classique-FN (Villeneuve-Saint-Georges, L’Hôpital) ; c’est sûr, dès leur formation, l’UMP hurle au scandale, d’où des déperditions d’électeurs.

La direction de l’UMP n’a nullement remis en cause son étatisme concernant les questions économiques et demeure très timorée sur les questions de société. Autrement dit rien n’est gagné pour 2017. Pendant ce temps le Front National marque des points en emportant treize mairies (et n’oublions pas la Ligue du Sud avec Orange, Bollène et Camaret-sur-Aigues). D’ici là on regardera avec attention les résultats des élections européennes du 25 mai : assistera-t-on à l’émergence d’un tripartisme ? Nous serons bientôt fixés.


Autrement vous pouvez retrouver les nouveaux enregistrements du mois sur mon site Classical Music Mobile (les 4 symphonies de Schumann, le Divertimento de Bartok, l'Appassionata de Beethoven). Toujours à 1 euro seulement. Ecoutez les extraits !

Philippe Herlin

lundi 24 mars 2014

L’UMP doit lever l’interdiction des alliances locales avec le FN

Après le premier tour des élections municipales, tous les commentateurs ont convenu de la baisse du PS, du bon résultat du l’UMP et de la poussée du FN. Effectivement, mais il faut insister sur les deux derniers points : l’UMP (tout comme l’UDI) ne réalise pas de véritable percée, aucun "nouveau nom" n’apparaît au soir de cette élection et cette formation est incapable d’inquiéter la gauche, pourtant en recul, à Paris, Lyon ou Lille. La performance c’est le FN qui la réalise en multipliant ses scores par deux ou trois par rapport aux municipales précédentes et en réussissant des cartons dans de nombreuses villes (Hénin-Beaumont, Béziers, Fréjus, Forbach, Tarascon, Perpignan, Avignon, etc.). Lorsque le FN présente une personnalité connue (Florian Philippot, Louis Aliot, Gilbert Collard, Robert Ménard) ou bien implantée (Steeve Briois, David Rachline à Fréjus, Valérie Laupies à Tarascon), le candidat UMP est balayé de la même façon que celui du PS. Il faut se rendre à l’évidence : le Front National constitue l’élément le plus dynamique de la droite.

Dans ce cadre, l’interdiction par l’UMP de toute alliance locale avec le FN est stupide car elle coupe en deux de façon artificielle l’électorat de droite ; un électorat qui, lui, y est favorable selon tous les sondages récents, dont le dernier en date. Elle empêche de donner un grand coup de balai à la gauche municipale. Elle traduit un mépris pour les électeurs FN que ceux-ci font payer au deuxième tour lors d’un duel PS/UMP (par exemple Hollande-Sarkozy…). Elle est incompréhensible car au niveau local les différences de programme entre UMP et FN sont faibles, et en réalité convergent autour des thèmes de l’insécurité et de la baisse des impôts. Et cela n’empêcherait en rien de refuser tout accord au niveau national, tant il est vrai que les différences sur les programmes économiques demeurent irréconciliables, nous sommes bien d’accord.

Ce refus d’alliances locales est aussi dangereux car ce premier tour montre l’émergence d’un tripartisme PS-UMP-FN. Or, dans notre système majoritaire à deux tours, le tripartisme n’est pas viable à long terme, on reviendra rapidement à un bipartisme. Il suffirait de pas grand chose, par exemple que l’UMP présente à l’élection présidentielle de 2017 un candidat de la "fausse droite" comme Alain Juppé pour être pulvérisé par Marine Le Pen. C’en serait alors vite fini de l’UMP… Ce refus d’alliance équivaut à un suicide, il est temps d’y mettre fin.

PS : aidez-moi à défendre cette position au sein de l’UMP, cliquez sur ce lien, merci.

Philippe Herlin

samedi 22 mars 2014

Quand Jean-Marc Ayrault organisait sa "petite Stasi" à Nantes en 2007

La gauche est vent debout contre la référence à la Stasi que fait Nicolas Sarkozy dans sa lettre au Français. Elle est justifiée, j'y ai répondu dans mon billet précédent. Mais je voudrais aussi revenir sur une affaire oubliée, bien à tort.

Dans la perspective des élections municipales de 2008, Jean-Marc Ayrault, qui préparait sa réélection à la tête de la ville de Nantes, avait envoyé fin 2007 un courrier à 200 militants du PS pour leur demander tout à fait explicitement de ficher les "opposants notoires à la municipalité". On pourra lire cet article de l'époque du Télégramme et consulter les documents originaux dans cet article de Rue89.

Maintenant cet homme est Premier ministre et il dispose en conséquence de moyens incomparablement plus importants que ceux d'une mairie. A l'époque Jean-Marc Ayrault a réagi en expliquant que "la formule retenue est maladroite" (Libération). Waouh, quel vigoureux démenti ! Nous voici tout à fait rassurés sur son intégrité morale et sur l'avenir des libertés en France.

Philippe Herlin

vendredi 21 mars 2014

Dimanche, pas une abstention à droite !

Je vous invite à lire la lettre de Nicolas Sarkozy aux Français publiée aujourd’hui, elle explique clairement la situation dangereuse dans laquelle le pays est en train de glisser. Rappelons que l’ancien président est sur écoute depuis huit mois sur la base d’un prétexte parfaitement bidon : le supposé financement de sa campagne présidentielle de 2007 par Khadafi. Lorsque la France a déclaré la guerre à la Libye en 2011, Khadafi aurait eu toutes les raisons d’apporter les preuves de ce financement de façon à gêner celui qui le bombardait. Mais il n’en a rien fait et c’est seulement le site Mediapart, entre les deux tours de la présidentielle de 2012, qui a balancé un soi-disant document l’attestant… Cela a néanmoins suffit à des juges pour sortir l’artillerie lourde des écoutes prolongées, des juges dont certains sont membres du Syndicat de la magistrature, les auteurs du fameux "mur des cons".

Réagissant à cette lettre, François Hollande a dénoncé la référence de Sarkozy à la Stasi, le service d’espionnage du régime est-allemand. Lorsque la justice est noyautée par l’extrême gauche et la gauche, c’est bien de cela dont il s’agit. On en prendra aussi pour preuve la déclaration stupéfiante du ministre Benoît Hamon : "Si on a rien à se reprocher, il n’y a pas de problème à être écouté", ce qui est précisément la justification d’un service tel que la Stasi.

J’avais posé la question ici le 3 février dernier : Le gouvernement commence-t-il à basculer dans l'autoritarisme ? En voici une étape supplémentaire. Dimanche, avec le premier tour des élections municipales, nous avons l’occasion de nous exprimer, il ne faut pas la gaspiller, alors surtout : pas une abstention à droite. Et chacun votera UMP, FN ou autres, selon ses choix, et au deuxième tour se rassemblera derrière la liste arrivée en tête, pour faire battre la gauche. Il faut envoyer un avertissement qui fasse trembler les murs de l’Elysée.

Philippe Herlin

lundi 10 mars 2014

Mon débat avec Olivier Delamarche, Pierre Jovanovic et Helène Feron-Poloni

Hier sur Radio Courtoisie était diffusé un débat - "La crise pour les nuls" - auquel je participais avec Olivier Delamarche (de Platinium Gestion), Pierre Jovanovic (son blog), et Hélène Feron-Poloni (du cabinet Lecoq-Vallon & Feron-Poloni). Le voici disponible sur YouTube:

Philippe Herlin

jeudi 6 mars 2014

Avec Bill Viola, résistons au déferlement des images de la télévision, des clips, de YouTube et des blockbusters !

Mon texte pour Atlantico, à propos de l'exposition Bill Viola au Grand Palais : Avec Bill Viola, résistons au déferlement des images de la télévision, des clips, de YouTube et des blockbusters !

Et mon texte pour GoldBroker : Il n’y a toujours pas de reprise économique aux Etats-Unis ! (et en anglais)

Autrement, mon texte précédent, appelant à la démission de Jean-François Copé de la présidence de l'UMP, a obtenu un beau succès sur le Net (près de 100 retweets notamment), ce qui montre que cette idée est déjà largement partagée. A propos, on lira cette analyse du blog les-crises.fr qui explique que l'UMP est dans une situation financière désastreuse et ne survit que grâce aux banques (fonds propres négatifs depuis sa création en 2002 !). Par surcroît, les comptes se dégradent considérablement depuis que Copé en est le président, raison de plus pour demander son départ.

Philippe Herlin

mardi 4 mars 2014

Jean-François Copé doit démissionner de la présidence de l’UMP

Au départ il y a une enquête du Point du 27 février dernier qui affirme que Jean-François Copé a détourné de l'argent de son parti au profit d’une société de communication fondée par deux de ses proches : la société Bygmalion aurait profité de la période faste de la présidentielle 2012 pour "charger la mule" sur certaines prestations facturées à l'UMP hors appels d'offres. Cette entreprise aurait en outre des liens avec le Qatar à travers une personne avec qui Copé a été en relation lorsqu’il fut ministre du budget… Ceci dit, le président de l’UMP a fermement démenti et peut être allait-on en rester là.

Puis Jean-François Copé a annoncé qu’il allait faire lundi une "déclaration solennelle", on allait voir ce qu’on allait voir. On a vu et c’est un scandale. C’est le site LeLab qui a soulevé le lièvre : Copé promet la transparence totale des comptes de l’UMP mais en échange de deux lois tellement contraignantes qu’elles n’ont aucune chance de voir le jour (la publication des comptes de l’ensemble des formations politiques françaises depuis 2007, la publication du patrimoine des dirigeants et des principaux salariés de l’ensemble des médias français). C’est grotesque, d’autant que les comptes des partis sont déjà vérifiés par la Commission Nationale des Comptes de Campagne et des Financements Politiques, et qu’ils sont plutôt mauvais pour l’UMP comme le montre le site les-crises.fr. Mais voici le moment clé du discours : "Dans l’attente de l'adoption de ces dispositions législatives, je donne dès aujourd'hui l'ordre au Directeur Général des Services de l'UMP de bien vouloir mettre l'intégralité de la comptabilité de l'UMP ainsi que les archives concernant les campagnes présidentielles de 2007 et 2012, dans une pièce qui sera scellée par un huissier. Cette pièce sera réouverte à l'adoption de ces deux lois." (le discours intégral)

Vous avez bien lu, la véritable raison de cette intervention consiste à enfermer à double tour la comptabilité de l’UMP pour en empêcher l’accès à quiconque, y compris aux responsables du mouvement. Si Copé se dit innocent, pourquoi ne permet-il pas aux responsables de l’UMP (députés, sénateurs, bureau politique) de consulter ces documents, ce qui éteindrait toutes les rumeurs ? S’il agit ainsi, s’il use d’une telle manœuvre, si grossière et si brutale, c’est que l’enquête du Point a soulevé de vraies questions.

Un tel comportement est indigne et fait perdre à Jean-François Copé toute autorité et intégrité pour représenter le principal mouvement d’opposition face au pouvoir socialiste. Son maintien serait un cadeau à ce dernier, il doit démissionner au plus vite.


Addendum : un beau succès sur les réseaux sociaux pour cette info, merci ! (près de 100 retweets)

Philippe Herlin

lundi 3 mars 2014

Ukraine, etc. : faut-il défendre à tout prix l'intangibilité des frontières ?

A propos de ce qui se passe en ce moment en Ukraine, le principe de "l'intangibilité des frontières" est réaffirmé en boucle dans les médias, par les dirigeants politiques et les éditorialistes, avec une assurance absolue, comme si ce principe n'était pas discutable, et en sous-entendant que ceux qui le critiquent sont automatiquement du côté de la guerre.

Moi en tant que démocrate, libéral, je considère que c'est la démocratie et le respect des droits de l'homme qui doivent être intangibles, pas les frontières. Au nom de quoi quelque chose d'administratif devrait-il se trouver au-dessus des choix libres des individus ? Si des peuples décident démocratiquement de devenir indépendants ou de retracer des frontières, pourquoi les en empêcher ? Ce qu'il faut condamner, y compris par une intervention militaire de la communauté internationale, c'est la remise en cause des frontières par la force, nous sommes bien d'accord. Ce qu'il faut défendre c'est la démocratie et les libertés, qui incluent notamment le fait de permettre aux différents peuples (ou se considérant comme tels) d'un pays d'exprimer leur culture, pour justement éviter de les pousser à demander leur indépendance et à trop morceler les nations constituées ; c'est le principe de subsidiarité bien compris (dans ce cadre le référendum d'indépendance de l'Ecosse relève plus du caprice qu'autre chose tant ces libertés sont garanties au Royaume-Uni).

Faire croire que la guerre provient du non-respect du principe de l'intangibilité des frontières est faux : les régimes qui l'enfreignent sont dangereux en eux-mêmes bien avant ! Encore faut-il ouvrir les yeux et ne pas attendre d'être mis devant le fait accompli. Le régime nazi n'est pas devenu dangereux le 1er septembre 1939 lorsqu'il a envahi la Pologne, mais dès son arrivée au pouvoir le 30 janvier 1933 évidemment. Il ne faut pas attendre que l'Iran ou la Corée du Nord franchissent une frontière ou lancent un missile nucléaire pour lutter contre eux. Il y a par nature tout à craindre d'un régime autoritaire ou totalitaire (et à ce titre, on ne peut manquer de s'inquiéter de l'actuel pouvoir ukrainien largement infiltré par des milices fascistes comme Svoboda).

Alors pourquoi ce principe s'exprime-t-il avec autant de force ? L'intangibilité des frontières sous-entend que le dernier état de l'histoire est le meilleur, ou le moins mauvais, et donc qu'il ne faut pas le changer. Tout redécoupage équivaut à un "retour en arrière" affublé de tous les maux. La situation actuelle invalide tous les états antérieurs, ce qui veut dire que l'avancement de l'histoire constitue en soi un progrès, que l'histoire a un "sens". Voici une pure conception marxiste, un point de vue matérialiste (le sens de l'histoire prime la liberté des hommes), un historicisme comme aurait pu le dénoncer le grand penseur néoconservateur Leo Strauss. Ce n'est qu'une marque de plus de l'emprise de la gauche sur les esprits.

Ce qui s'est passé à Kiev c'est une mafia qui en remplace une autre, et Poutine a raison de récupérer la Crimée, le reste c'est de l'agitation médiatique. Le reste c'est aussi pour beaucoup l'occasion d'exprimer leur tropisme anti-russe, et c'est bien dommage. La Russie actuelle n'est pas un modèle de démocratie et de liberté d'expression, mais tous les habitants de la Crimée sont russes, alors. Cette région a toujours fait partie de la Russie, mais Khrouchtchev l'a donnée à l'Ukraine en 1954, sans aucune raison (la rumeur dit qu'il l'aurait perdue au poker). Faut-il défendre mordicus la décision de l'ancien dirigeant soviétique ? Poser la question, c'est y répondre.

Je pense au contraire qu'une remise en cause de ce principe dans un cadre démocratique, apaisé, et en respectant des procédures reconnues au niveau international, permettrait de résoudre quantité de tensions à travers le monde. Chacun sait que les frontières de l'Afrique relèvent du plus grand n'importe quoi, séparant des peuples ancestraux et en réunissant d'autres ne se connaissant pas, et que ces incohérences génèrent des crises permanentes. Et d'autres zones du monde sont concernées, comme l'Ukraine justement. C'est ce défi qu'il faudrait relever, plutôt que de s'accrocher à de vieilles lunes.

Philippe Herlin